10 Janvier 2013
Christophe André est médecin psychiatre à l'hôpital Sainte-Anne à Paris, il est l'auteur, entre autres, de Petites angoisses et grosses phobies (Editions du Seuil). Dans une interview de Laurence Ravier pour psychologie magazine, il nous explique que : Le trouble obsessionnel compulsif est une maladie anxieuse assez sévère. Le patient souffre d'idées fixes, qui deviennent envahissantes, angoissantes et tyranniques.
On répertorie aujourd'hui différentes familles de TOC : lavage (toilettes à l'excès, désinfection, obsession de la propreté...), vérifications (des portes, des lumières, de tout...), comptage et calculs mentaux (les patients comptent ou calculent sans arrêt de longues séries de chiffres...), accumulation (impossibilité de se débarrasser des objets inutiles), ordre et symétrie, toucher certains objets de manière répétitive, formules ou gestes conjuratoires...
Le mode opératoire de ces troubles est toujours le même : une idée intrusive surgit (ai-je bien éteint la lumière ?) qui déclenche une très forte angoisse. Il devient impératif d'aller vérifier. Et à chaque fois que cette interrogation obsédante ressurgit, le malade va se rassurer avec ce rituel de vérification. Mais ce mécanisme va rapidement tourner à l'obsession, les gestes rituels ne parviendront dès lors à baisser le niveau d'angoisse que de courts instants seulement. C'est ainsi que la personne ira vérifier 10 fois, 20 fois ou trente fois et que sa conduite va peu à peu être dominée et dirigée par son TOC.
Peut on guérir d'un TOC ?
Christophe André : Les guérisons totales et complètes sont très rares, il est préférable de parler de rémission partielle. Rémission, car un TOC peut toujours ressurgir chez un patient qui a été traité. Partielle, car on ne peut jamais éradiquer totalement les symptômes.
On obtient aujourd'hui de très bons résultats grâce à une prise en charge thérapeutique et médicamenteuse. On arrive ainsi à limiter les rituels à une heure par exemple, au lieu de plusieurs, et à permettre aux patients de reprendre une vie normale. Il est en effet difficile d'imaginer à quel point ces troubles peuvent dévorer votre vie : certaines personnes arrivent à prendre plus d'une vingtaine de douches par jour, chacune durant une heure. Le calcul est rapide à faire...
Il est donc primordial de consulter un spécialiste et de se faire soigner. D'autant qu'aujourd'hui, de très nombreux travaux de recherche sont en cours afin de mieux comprendre les TOC, qui ont des origines psychologiques mais également des origines biologiques indiscutables.
Quels conseils offrir à l'entourage ?
Christophe André : Si les TOC s'avèrent usants et épuisants pour ceux qui en sont victimes, il en est de même pour la famille. Les malades souffrent terriblement car ils se rendent parfaitement compte de l'absurdité de leurs gestes, mais ils sont démunis et impuissants. Ils peuvent même se montrer très colériques et agressifs s'ils sont bousculés dans leurs rituels.
Cependant, le premier conseil que je donnerai à l'entourage, c'est de ne jamais entrer dans le jeu du TOC. Sinon, tout le monde en devient l'otage. Cela requiert beaucoup de ténacité et de persévérance, car il est parfois plus facile de céder, d'annuler par exemple sorties, vacances ou dîners entre amis, devant l'angoisse ressentie par le malade. Il ne faut donc rien changer à la vie familiale, et rappeler au patient que ce TOC est son problème, pas le vôtre. Cela ne signifie bien sûr pas que vous êtes indifférent ou rancunier, mais il faut lui montrer quels sont les gestes normaux : se laver les mains en 5 minutes et non pas les désinfecter pendant une heure.
Il est également très important de convaincre la personne atteinte d'un TOC, qu'elle souffre d'une maladie et non pas d'une tare. Car tous se montrent très honteux et se cachent. Et il faut l'inciter à tout prix à se faire soigner. Je conseille le plus souvent deux adresses vers lesquelles on peut se tourner :
- l'AFTOC (Association française des personnes souffrant de troubles obsessionnels et compulsifs) (www.aftoc.fr)
- l'AFTCC (Association française de thérapie comportementale et cognitive) (www.aftcc.org)
juillet 2009