22 Août 2013
Par M.F Hirigoyen :
La mise en place de l’empreinte utilise des procédés qui donnent l’illusion de la communication une communication particulière, non pas faite pour relier, mais pour éloigner et empêcher l’échange.
Refuser la communication directe
Quand une question directe est posée, les pervers éludent. Comme ils ne parlent pas, on leur prête grandeur ou sagesse. On entre dans un monde où il y a peu de communication verbale, juste des remarques à petites touches déstabilisantes. Rien n’est nommé, tout est sous-entendu.
Le déni du reproche ou du conflit par l’agresseur paralyse la victime qui ne peut se défendre. L’agression est perpétrée par le refus de nommer ce qui se passe, de discuter, de trouver ensemble des solutions. S’il s’agissait d’un conflit ouvert, la discussion serait possible et une solution pourrait être trouvée.
Devant le refus de communication verbale directe, il n’est pas rare que la victime ait recours aux courriers. Elle écrit des lettres pour demander des explications sur le rejet qu’elle perçoit, puis, n’ayant pas de réponse, elle écrit à nouveau, cherchant ce qui dans son comportement, aurait pu justifier une telle attitude. Il se peut qu’elle finisse par s’excuser de ce qu’elle aurait pu faire, consciemment ou non, pour justifier ou on l’attitude de son agresseur.
Dans certaines entreprises, les victimes qui, pour se protéger, envoient des lettres recommandées sont qualifiées de paranoïaques procédurières.
Quand il y a une réponse, elle est toujours à côté, indifférente.
Déformer le langage
On retrouve chez les pervers quand ils communiquent avec leur victime, une voix froide, blanche, plate, monocorde. C’est une voix sans tonalité affective, qui glace, inquiète, laissant affleurer dans les propos les plus anodins le mépris ou la dérision. La tonalité seule implique, même pour des observateurs neutres, des sous-entendus, des reproches non exprimés, des menaces voilées.
Même lors d’échanges violents le ton ne s’élève pas, laissant l’autre s’énerver tout seul, ce qui ne peut que le déstabiliser «écidément, tu n’es qu’un hystérique qui crie tout le temps».
Très souvent, le pervers ne fait l’effort d’articuler ou bien grommelle quelque chose quand l’autre est dans une autre pièce. Cela met lautre dans l’obligation de se déplacer pour entendre ou bien d’être en position de demandeur en faisant répéter. Il est facile ensuite de lui faire remarquer qu’il n’écoute pas.
Le message d’un pervers est délibérément flou et imprécis, entretenant la confusion. Il peut dire «n’ai jamais dit cela », et éviter tout reproche. En utilisant des allusions, il fait passer ses messages sans se compromettre.
Offrant des propos sans lien logique, il entretient la coexistence de différents discours contradictoires.
Il peut aussi ne pas terminer ses phrases, laissant des points de suspension qui ouvrent la voie à toutes les interprétations et à tous les malentendus. Ou bien il envoie des messages obscurs et refuse de les expliciter.
A une demande de service anodin d’une belle-mère à son gendre
« ce n’est pas possible
- Pourquoi
- Vous devriez le savoir
- Non, je ne comprends pas
- Eh bien, cherchez »
Ces propos sont agressifs mais dits sur un ton normal, calme, presque détendu, et l’autre, dont la réponse agressive est désamorcée a l’impression de réagir à côté.
Un autre procédé verbal habituel des pervers est d’utiliser un langage technique abstrait, dogmatique, pour entraîner l’autre des considérations auxquelles il ne comprend rien, et pour lesquelles il n’ose pas demander d’explications de peur de passer pour un imbécile. Ce qui importe alors dans le discours pervers, c’est la forme plutôt que le fond, paraître savant pour noyer le poisson. Pour répondre à sa femme qui souhaitait parler de leur couple, un mari prend un ton docte
«présentes une problématique typique des femmes castratrices qui projettent sur les hommes leur désir de phallus».
Ces interprétations psychanalytiques sauvages réussissent à déstabiliser l’autre, qui est rarement en état de répliquer pour renverser la situation à son avantage. Les victimes disent souvent que les arguments de leur agresseur sont tellement incohérents qu’elles devraient en rire, mais tant de mauvaise foi les met en colère.
Un autre procédé pervers consiste à nommer les intentions de l’autre ou à deviner ses pensées cachées, comme si on savait mieux que lui ce qu’il pense. « Au fond, je sais très bien que tu te dis que ... »
Mentir
Plus souvent qu’un mensonge direct, le pervers utilise d’abord un assemblage de sous-entendus, de non-dits, destiné à créer un malentendu pour ensuite l’exploiter à son avantage. Il s’agit d’avoir le dessus dans l’échange verbal. Un procédé trop direct amènerait le partenaire à dénoncer l’autoritarisme de l’agresseur. Au contraire, des techniques indirectes le déstabilisent et l’amènent à douter de la réalité de ce qui vient de se passer.
Un autre type de mensonge indirect consiste à répondre de façon imprécise ou à côté, ou par une attaque qui fait diversion. A une femme qui exprimait ses doutes sur la fidélité de son mari «dire quelque chose comme ça, il faut que, toi, tu aies quelque chose à te reprocher».
Le mensonge peut également s’attacher aux détails à sa femme qui lui reproche d’être allé huit jours à la campagne avec une fille, le mari répond
«’est toi la menteuse, d’une part ce n’était pas huit jours mais neuf, et d’autre part, il ne s’agissait pas d’une fille mais d’une femme »
Le mensonge chez le pervers narcissiques ne devient direct que lors de la phase de destruction. C’est alors un mensonge au mépris de toute évidence. C’est surtout un mensonge convaincu qui convainc l’autre. Quelle que soit l’énormité du mensonge, le pervers s’y accroche et finit par convaincre l’autre.
Manier le sarcasme, la dérision, le mépris
En résumé, pour déstabiliser l’autre, il suffit de
- se moquer de ses convictions, de ses choix politiques, de ses goûts,
- ne plus lui adresser la parole,
- le ridiculiser en public,
- le dénigrer devant les autres,
- le priver de toute possibilité de s’exprimer,
- se gausser de ses ponts faibles,
- faire des remarques désobligeantes, sans jamais les expliciter,
- mettre en doute ses capacités de jugement et de décision.
User du paradoxe
Déstabiliser la victime se fait dans une double contrainte quelque chose est dit au niveau verbal et le contraire est exposé au niveau non verbal. Le discours paradoxal est composé d’un message explicite et d’un contenu implicite, dont l’agresseur nie l’existence.
Disqualifier
Diviser pour mieux régner
Imposer son pouvoir